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France + Suivi = 15,00 €
Jean-Marc Foussat :
extraits :
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. . . Q’une catastrophe tumultueuse ruine tous les paravents et les circonstances et les voilà,
grains de sable perdus dans une plaine plate, réuni par l’imaginaire ligne droite qui relie tout
être à n’importe quel autre être. Le temps ni l’espace, rien ne s’oppose à ces relations idéales.
Vie boulversée, contraintes mondaines, obligations terrestres, tout s’écroule. Les humains n’en
sont pas moins soumis aux mêmes dés arbitraires.
Dans le désert, perdu, irrémédiablement perdu, l’explorateur casqué de blanc se rend compte
enfin de la réalité des mirages et des trésors inconnus, les faunes rêvées, les flores invraisemblables
constituent le paradis sensuel où il évoluera désormais, épouventail sans moineaux,
tombeau sans épitaphe, homme sans nom, tandis que, formidable déplacement, les pyramides
révèlent les dés cachés sous leur masse pesante et posent à nouveau le problème irritant de la
fatalité dans le passé et de la destinée dans le futur.
Robert Desnos
La Liberté ou l’amour !
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Encore un bel enregistrement de musique utopiste, improvis ée certes, et où deux instrumentistes opiniâtres, le saxophoniste Quentin Rollet et la joueuse de vielle à roue – chanteuse Emmanuelle Parrenin s’infiltrent dans les vagues et strates électroniques de l’antique synthé AKS de Jean-Marc Foussat. JMF intervient aussi avec sa voix dont il transforme le son électroniquement, EP vocalise majestueusement comme une fée venue d’un autre temps, terrienne et éthérée à la fois. QR qui souffle dans son alto et son sopranino agrémente l’ensemble de « petite électronique » laquelle crée des correspondances texturales avec le flux du synthé et les résonances cordiales et sympathiques de la vielle à roue. Pour rappel, c’est la giration d’une roue par-dessous les cordes qui les met en vibration sonore avec ce timbre nasillard caractéristique. Emmanuelle se concentre sur un jeu oscillant ou tournoyant comme un murmure dans les feuilles des arbres tout en livrant quelques surprises sonores. L’étendue des registres du synthé de Jean – Marc s’est singulièrement étoffée, et offre souvent des effets inouïs qu’ils soient sourds et orageux, frémissants ou diffus, parfois au bord de murmures simulant des glissandi offrant à ces camarades à l’écoute de créer des sonorités en empathie qui touche au sensible magique. Le saxophoniste alterne des froissements de la colonne d’air et des boucles de notes en vrille. Une atmosphère planante truffée de riches agrégats sonores, de scories bruissantes, de tournoiements imperceptibles Quatre improvisations nommées « à Fleur » , « à Corps », « à Vif » , « Amour » s’étageant dans des durées de 8 à 16 minutes dans une poésie de partage, de collusion, d’improbables cohérences dans un no man’s land de formes qui s’évanouissent ou aboutissent aux instants de chaos de l’Amour. Dans la pochette intérieure, l’auditeur peut lire des lignes du poète Robert Desnos, extraites de son « La Poésie ou l’Amour ». On ne pourrait trouver un texte aussi proche de la musique qui s’est jouée ce 23 avril 2022 à la Boutique des Allumés du Jazz. Ce n’est pas le premier album réunissant ces trois artistes l’un à l’autre avec l’un ou l’autre collègue inspiré (Foussat – Christian & Q. Rollet Entrée des Puys de Grêle et Bopp-Foussat-Parrenin Nature Still, parus tous deux chez FOU Records), et ce dernier, Haut-Cœur, peut-être plus convaincant apporte sa part de mystères, face cachée d’un astre inconnu, mais bien présent. Je ne peux m’empêcher de reproduire ici les mots de Desnos : «… Qu’une catastrophe tumultueuse ruine tous les paravents et les circonstances et les voilà, grains de sable perdus dans une plaine plate, réunis par l’imaginaire ligne droite qui relie tout être à n’importe quel autre être. Le temps ni l’espace, rien ne s’oppose à ces relations idéales. Vie bouleversée, contraintes mondaines, obligations terrestres, tout s’écroule. Les humains n’en sont pas moins soumis aux mêmes dés arbitraires. Dans le désert, perdu, irrémédiablement perdu, l’explorateur casqué de blanc se rend compte enfin de la réalité des mirages et des trésors inconnus, les faunes rêvées, les flores invraisemblables constituent le paradis sensuel où il évoluera désormais, épouvantail sans moineaux, tombeau sans épitaphe, homme sans nom, tandis que, formidable déplacement, les pyramides révèlent les dés cachés sous leur masse pesante et posent à nouveau le problème irritant de la fatalité dans le passé et de la destinée dans le futur. » Un beau projet !!
Jean-Michel Van Schouwburg
21 octobre 2022
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Jean-Marc FOUSSAT/Emmanuelle PARRENIN/Quentin ROLLET
HAUT-CŒUR
FOU RECORDS (FR-CD-42)
Et pour bien commencer, l'un des deux enregistrements auxquels Jean-Marc participe en tant que musicien : Haut-cœur. Il y retrouve Emmanuelle Parrenin, joueuse de vielle à roue avec laquelle il avait gravé le sombre et magnifique Nature Still, en compagnie de Christiane Bopp, et le saxophoniste Quentin Rollet, dont le label Bisou coproduisit avec Fou le non-moins enthousiasmant Entrée des Puits de Grêle. A travers le prisme de ses synthétiseurs, mêlés ici au souffle détimbré des saxophones, Jean-Marc Foussat aime à concevoir des climats fantastiques plus proches de Mœbius que de George Sand. Les paysages échappés de ses machines tendent vers l'infini d'un espace rêvé où des glaciers détachés d'astres éteints dérivent dans le silence. Des satellites oubliés traversent en sifflant l'épaisseur de la nuit que la mémoire du vent semble encore balayer. Derrière le hublot d'un vaisseau égaré, le trio assiste à sa propre fuite… Etrangement terrestre en ce contexte sidéral, la vielle d'Emmanuelle Parrenin rejette la tentation répétitive du bourdon pour remonter à la source d'un Orient imaginaire. Surgissant du magma sonore auquel elle participait, entre grésillements furtifs et murmures mécaniques, elle emprunte au son du violon pour calligraphier sur fond de tempête cosmique un caractère limpide, signe d'apaisement dont la fluidité induit le rythme et, peu à peu, la danse. Les traits du sax alto s'imposent puis se diluent dans la matière synthétique, s'effacent devant la courbe d'une mélopée tracée par la voix de la vielliste. Et l'électronique parsème de poussières d'étoiles cet instant dérobé à l'esthétique originale.
Je ne sais si la formation initiale de Jean-Marc Foussat en est la cause, mais les termes employés pour traiter de son art recourent plus aisément au vocabulaire plastique qu'à la terminologie musicale. On parle d'espace, de traits, de courbes, de paysages, de signes, de caractères… De fait, si la poésie de ce trio passe bien par les oreilles pour atteindre notre sensibilité, elle se voit de suite métamorphosée en images assez concrètes pour qu'on puisse les décrire, comme un film dont ces échanges constitueraient la bande originale. A l'exception de certains passages où Quentin Rollet se souvient qu'il fut et demeure un excellent saxophoniste free, quand ses partenaires lâchent la bride qu'il a sur le cou pour qu'il débusque, çà et là, un frisson d'alto convulsif, une trille continue de sopranino ou le crépitement des clés sur les touches, l'ambient concocté dans la marmite de ces trois bouilleurs de fantasmes "réunis par l'imaginaire ligne droite qui relie tout être à n'importe quel autre être"* relève d'une forme de science-fiction dont l'abstraction n'interdit certainement pas l'interprétation.
*Robert Desnos dans l'extrait de la liberté et l'amour cité à l'intérieur du digipack.
Joël Pagier
Revue & Corrigée n° 134 décembre 22
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Fou Records / distr. Les Allumés du Jazz
Jean-Marc Foussat : synthé AKS, voix & jouets
Emmanuelle Parrenin : vielle à roue, voix
Quentin Rollet : saxophones alto & sopranino, petite électronique
Toujours à la manœuvre, le magicien du son Jean-Marc Foussat nous propose quatre nouvelles parutions sur son catalogue. En avril 2022 au Mans, ce champion des combinaisons entre électronique et acoustique réunissait autour de lui Emmanuelle Parrenin à cet instruments fort ancien, la vielle à roue, qu’on considère parfois comme l’ancêtre du synthétiseur (!) et Quentin Rollet aux saxophones, trio “impossible” s’il en est. Or ces instruments s’accordent à merveille, se mêlent et s’harmonisent dans les quatre pièces qui constituent ce récital surprenant. Un vrai travail de composition bâti sur une architecture spontanée complexe.
Jean-Buzelin
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